C’est ce à quoi nous a invités le P. Jean-Noël Audras, de l’équipe Manrèse. Nous fêtons aujourd’hui saint Jean-Baptiste - 24 juin, jour du solstice d’été, ce jour où le soleil monte au plus haut dans le ciel et éclaire le plus longtemps l'un des deux hémisphères. Pour nous, de l’hémisphère nord, c’est le jour le plus long de l’année. C’est le jour où la lumière de Dieu montre sa puissance avant d’entamer une longue diminution qui la conduit à la nuit de Noël, la nuit de la lumière intérieure, la nuit obscure et lumineuse où la joie habite les cœurs pauvres qui contemplent Dieu qui se donne, la faiblesse d’un enfant nouveau-né.
Ainsi Jean-Baptiste était-il l’homme tout entier tourné vers Celui qu’il annonce, Celui qui est le sens de sa mission : Voici l’Agneau de Dieu.
Jean dont le peuple se demandait s’il n’était pas le Christ, et qui répondait : (Jean 1,27) Pour moi, je vous baptise avec de l’eau, mais vient le plus fort que moi, et je ne suis pas digne de délier la courroie de ses sandales ; lui vous baptisera dans l’Esprit Saint et le feu.
Plus tard, à ses disciples qui lui demandaient : « Rabbi, celui qui était avec toi de l’autre côté du Jourdain, celui à qui tu as rendu témoignage, le voilà qui baptise, et tous vont à lui ! » Jean répondit : « Un homme ne peut rien s’attribuer, sinon ce qui lui est donné du Ciel. Vous-mêmes pouvez témoigner que j’ai dit : Moi, je ne suis pas le Christ, mais j’ai été envoyé devant lui. Celui à qui l’épouse appartient, c’est l’époux ; quant à l’ami de l’époux, il se tient là, il entend la voix de l’époux, et il en est tout joyeux. Telle est ma joie : elle est parfaite. Lui, il faut qu’il grandisse ; et moi, que je diminue ». Celui qui vient d’en haut est au-dessus de tous. Celui qui est de la terre est terrestre, et il parle de façon terrestre. Celui qui vient du ciel est au-dessus de tous » (Jean 3,26-31).
Nous avons demandé au Seigneur dans l’oraison, et nous le ferons encore dans la prière finale, qu’il donne la joie à son Eglise. Nous voyons ici ce qu’est cette joie, c’est la joie de l’ami de l’époux. La joie de celui qui au plus profond de soi voudrait diminuer pour que l’époux grandisse. La joie de Jean-Baptiste, c’était la joie d’entendre la voix de l’époux, de le contempler, de se laisser déstabiliser par lui comme, au tout début de sa rencontre avec Jésus, quand celui-ci vint se faire baptiser par lui : Jean voulait l’en empêcher et disait : « C’est moi qui ai besoin d’être baptisé par toi, et c’est toi qui viens à moi ! » (Matthieu 3,14). C’est de chercher cette joie qui nous prépare à la recevoir et à nous laisser appeler par Celui qui en est l’objet.
C’est vrai, il y a dans Jean-Baptiste le descendant d’Elie, celui qui est rude lorsqu’il appelle à la conversion ou affronte le mal. Voyant beaucoup de pharisiens et de sadducéens se présenter à son baptême, il leur dit : « Engeance de vipères ! Qui vous a appris à fuir la colère qui vient ? Produisez donc un fruit digne de la conversion. N’allez pas dire en vous-mêmes : “Nous avons Abraham pour père” ; car, je vous le dis : des pierres que voici, Dieu peut faire surgir des enfants à Abraham. » (Matthieu 3,7-9). Sachons aussi accepter de telles paroles quand elles nous sont adressées, pour préparer son Eglise à chercher la joie en suivant la voie de Jean-Baptiste : Il faut qu’il grandisse et que moi je diminue.
Jean-Baptiste, le plus grand des enfants des hommes, né d’une supplication répétée de ses parents, porte le nom qui dit sa mission : Le Seigneur fait grâce. Il est l’homme de la gratuité du don caché de Dieu.
Il est né d’une mère croyante et patiente, et d’un père trop réaliste pour croire en l’impossible, un père sourd à l’annonce et par là rendu muet, ramené à la perception des signes, pour renaître, s’éveiller à une parole nouvelle, une parole de bénédiction lorsqu’il donne à son fils le nom qui le remet à Dieu. Jean se retire dans le désert, attendant le moment où l’époux serait manifesté à Israël.
Jean, homme emprisonné, est homme de foi et de question : Es-tu celui qui doit venir ou devons-nous en attendre un autre ? (Matthieu 11,2)
Jean sut dire oui et dire non, et paya le prix de ses paroles.
Jean, le témoin du Royaume qui vient, ne cesse de renvoyer à Celui dont il témoigne, homme d’effacement, homme qui ne s’attribuait rien sinon ce qui lui était donné du Ciel.
Jean nous est donné comme signe, témoin de la joie, la vraie joie du disciple - celui qui est heureux de la joie de son maître comme le serviteur bon et fidèle (Matthieu 25,21) - témoin d’une joie qui déborde en annonce, témoin déjà d’une joie qui se laisse prendre sa vie.
P. Jean-Noël Audras, sj, équipe Manrèse.