Vivre l’Église, aujourd’hui
« Pierre, m’aimes-tu ? » demande le Christ ressuscité à celui à qui il confie l’Église. Toujours, dans l’Église, il s’agit d’une relation vivante à son Seigneur, et entre tous, de relations fraternelles au service de la vie qui se donne, au service du Royaume qui vient. « Vivre l’Église » est parfois douloureux. Mais que dire, que faire, quand des scandales et des crimes la défigurent ? Quand notre attachement à l’Église est mis à mal. Quand il ne se passe pas de semaine sans que de nouveaux crimes pédophiles soient révélés. Dans sa Lettre au Peuple de Dieu, le pape François nous invite à écouter les victimes, dans une compassion réelle, mais aussi à vivre une conversion personnelle et communautaire, une « conversion de l’agir ecclésial ».
Comment est-ce que je comprends cette conversion et comment puis-je la nommer, afin de la désirer et de pouvoir la demander à Dieu ? Grâce de me laisser atteindre et de vivre une solidarité plus profonde au sein du Corps du Christ. Refus de toute forme de cléricalisme, en moi et chez autrui. Car le cléricalisme n’abîme pas seulement les relations dans l’Église, en niant l’égale et commune dignité de tout baptisé ; il est aussi le terreau qui peut conduire à toute forme d’abus « de pouvoir et de conscience », en répandant le poison de la domination d’autrui.
Qu’est-ce que je dois concrètement changer dans ma manière d’être et de vivre en Église ? Quels sont cette prière et ce jeûne que le pape nous appelle à vivre, afin d’éprouver, comme membres du Corps du Christ, « honte, douleur et confusion » ainsi que le dit saint Ignace ?
À Manrèse, en équipe, nous voulons, nous aussi, entrer plus avant dans ce chemin de réflexion et de conversion, par l’accueil et l’écoute de victimes, dans un accompagnement spirituel qui respecte toujours les consciences et développe une culture de la prévention, en aidant chacun des retraitants à grandir dans un attachement juste à l’Église, grâce aux Exercices spirituels. Nous n’aurons jamais fini d’apprendre les uns des autres à confier au Seigneur « ce que nous voulons et désirons » pour son Corps, dans la gratitude pour la vie qui s’y engendre ; à remettre au Christ ce qui nous blesse et nous éprouve ; à oeuvrer courageusement pour que l’Église vive mieux, dans une attention renouvelée à tout ce qui nait, ici et maintenant, quand la Parole est accueillie.
« Ne nous laissons pas voler la joie de l’Évangile », ni la joie de l’Église.
Père Paul Legavre sj, directeur de Manrèse, 19 octobre 2018
Téléchargez ici la Lettre au Peuple de Dieu du Pape François.